22 octobre 2013 à Québec
La marche sous une petite pluie a commencée par l’intervention de Nancy Roy qui a rappelé l’histoire d’un de ses amis décédé en silence sur un stationnement à Québec. C’est pourquoi cette marche fut silencieuse, pour rappeler tous les gens qui meurent en silence pourtant sur nos rues et que la société et le politique ne veulent pas voir, ni vouloir réellement aider. Près de 70 personnes étaient présentes pour cette marche contre la répression des personnes marginalisées, initiée par Nancy Roy et appuyée par sept organismes d'aide de Québec.
« L'objectif est de faire cesser la répression policière pour la remplacer par des services adaptés à la réalité des personnes marginalisées », explique Sébastien Harvey de la Ligue des droits et libertés, section Québec.
Des amendes répressives à l'égard des personnes marginalisées
Des personnes itinérantes reçoivent des milliers de dollars d'amende pour flânage. « Une personne itinérante, n'est-ce pas normal qu'elle soit assise sur un banc de parc ? », demande M. Harvey de la Ligue. En plus des personnes itinérantes, ce sont diverses personnes marginalisées qui reçoivent des amendes. Le fait que ces amendes ne sont presque jamais émises contre les personnes n'ayant pas l'air marginales, amènent de nombreux mouvements sociaux à dénoncer ce qu'ils qualifient de profilage social. Cet état de fait a été confirmé par des recherches invoquées par la Commission des droits de la personne et de la jeunesse et dénoncé par le Barreau du Québec.
Plusieurs règlements municipaux permettent à la police un large éventail d'amendes. Les amendes les plus utilisées sont celles pour flânage et contre le fait de dormir sur un banc de parc. De nouveaux articles ont été adoptés en 2012 par le maire Labeaume. Les personnes itinérantes peuvent facilement recevoir des amendes en vertu de ces nouveaux articles « sur la paix et le bon ordre » qui interdissent de se créer un abri de fortune, d'être dans un parc après 23 h et même « d’être présent à un attroupement sur le domaine public entre 23 heures et 5 heures ». Le nouveau règlement interdit aussi toute manifestation spontanée sur un trottoir ou sur un parc sans d'abord aviser le SPVQ du rassemblement. De nombreux organismes à Québec ont dénoncé ce règlement et jugent qu'il sera appliqué exclusivement contre des personnes marginalisées, mais aussi à l'encontre de manifestations moins appréciées par la Ville.
Remplacer la répression par des services adaptés
Les services demandés sont un « drop in » (espace d'accueil libre), une clinique de santé, un site d’injection supervisé (SIS) et une clinique juridique adaptés aux personnes marginalisées, surtout au centre-ville.
Le nouveau projet Drop-In fut annoncé au micro, soit un centre avec un haut taux d'acceptabilité, c'est-à-dire que les personnes rejetées ou bloquées par d'autres refuges pourront espérer trouver un endroit chaud et accueillant malgré tout. Ce dernier inclut désormais le Projet Lune qui vise à donner un lieu d'accueil par et pour les femmes prostituées.
« La Cour suprême du Canada a considéré les SIS comme des services essentiels et on s'entend que cette cour surpasse ce qu'en pense la cour municipale ou la mairie de Québec » a déclaré au micro le porte-parole de l'ADDICQ (L'Association pour la défense des droits et l'inclusion des personnes qui consomment des drogues de Québec). Il ajoute que « le service, pour fonctionner, doit être situé près des endroits où sont les gens concernés. Il sera dans le quartier Saint-Roch et non pas ailleurs ».
Nico est venu au micro pour témoigner qu'il est consterné par le grand nombre de décès chez des jeunes qu'il a côtoyés à Montréal qui consommaient des drogues dures. Il plaide donc pour un SIS à Québec, car « c'est prouvé qu'un tel service sauve vraiment des vies ».
Théâtre de rue pour la solidarité
À la Place d'Youville, quatre personnes ont joué une petite pièce de théâtre silencieuse. Un citoyen marche, mais il ne voit pas un homme itinérant au sol. Il ne voit pas non plus la personne assise au sol qui s'injecte une drogue intraveineuse, ni la femme prostituée sur la rue. Soudain, quand les trois semblent faibles ou mourants, le citoyen se rend compte de leur présence, les aide à se relever et à s'unir en solidarité. C'était le fruit du Théâtre les Merveilleuses têtes heureuses, une troupe-école de théâtre d’intervention et de sensibilisation en santé mentale.
Étaient présents aussi des membres de Point de repères, du Projet intervention prostitution Québec (PIPQ) et du Relais la Chaumine.
- Michaël Lessard (Média reseauforum.org)