La salle du Studio P était comble pour cette 3e projection, le 23 septembre, d'un documentaire indépendant de Québec intitulé Pas de piquerie dans mon quartier, réalisé par Jonathan et Jean-Laurence Seaborn. Ce film nous fait découvrir des personnes de Québec souffrant de dépendance à une drogue dure, mais aussi des intervenants locaux plaidant pour un service d'injection supervisée. Plusieurs d'entre elles étaient d'ailleurs présentes dans la salle.
C'est un film à voir, car les personnes filmées sont présentées de manière authentique. On suit d'abord un homme qui explique son quotidien où il s'injecte dans un parc public, mais pour ensuite découvrir d'autres aspects de sa personne et de sa vie. Un couple d'amoureux dans Saint-Roch témoigne de leurs espoirs et de leur lutte pour se libérer de la toxicomanie, mais aussi de leurs angoisses face au VIH et à l'Hépatite C contractés lors d'injections passées. Sans contredit, la force de ce documentaire est de nous faire voir, derrière les préjugés sur la toxicomanie, des êtres humains sensibles, réfléchis et authentiques.
Parmi les intervenants interviewés, on suit surtout Mario Gagnon de l'organisme Point de repères. On se rappelle qu'en 2011, la Société de développement commercial de Québec, CHOI FM, la police et la Ville de Québec ont refusé l'idée d'un service d'injection supervisée. Leur refus était assez expressif et rien n'indique que leur position ait changée. Les intervenants sont alors obligés d'expliquer qu'un service d'injection supervisée aide nos frères et soeurs toxicomanes à ne pas contracter des maladies infectieuses et créé un contact humain pour les aider à se libérer de leur dépendance. Il s'agit d'un service de santé appuyé par le système médical et par la Cour suprême du Canada. Ultimement, l'ancien ministre libéral de la santé au Québec a donné son appui au projet malgré les résistances commerciales de Québec.
Les arguments sont nommés de manière vulgarisée et claire. Le documentaire débute par l'affirmation qu'il faut combattre la drogue et non pas les drogués et rappelle qu'un service d'injection supervisée n'aura logiquement aucun impact sur le nombre de personnes toxicomanes dans le quartier Saint-Roch qui sont déjà là. Les injections sur la rue ou dans nos parcs augmentent énormément les risques de blessures, d'infection dont l'Hépatite C et le VIH. Soigner une seule personne aux prises avec l'Hépatite C coûterait 22,000 $ par année. Surtout, comme l'explique une infirmière, le service d'injection supervisée représente « un pas vers la sortie » pour la personne toxicomane.
À notre avis, la plupart des commerçants vont bientôt saisir qu'il est irrationnel et contraire à nos valeurs de société de bloquer un tel service de santé et de relation d'aide permettant de sauver des vies.
- Michaël Lessard
( Cet article a été rédigé pour le journal Droit de parole )
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