Près d’un millier de jeunes Canadiens, Québécois et Autochtones se sont rassemblés pour discuter de justice climatique et environnementale lors de l’événement PowerShift tenu à Ottawa du 26 au 29 octobre derniers. L’événement a culminé en une « marche toxique » à travers la capitale nationale pour demander au gouvernement fédéral de cesser l’octroi de subventions annuelles de 1,4$ milliard à l’industrie des combustibles fossiles.
L’idée n’est pas nouvelle. Lors du Sommet de Pittsburgh en 2009, les pays du G20, incluant le Canada, s’étaient entendus pour « éliminer progressivement et rationaliser à moyen terme les subventions inefficaces aux combustibles fossiles ». La Déclaration des chefs d’États et des gouvernements ajoute que ces subventions « encouragent la surconsommation, restreignent notre sécurité énergétique, font obstacle à l’investissement dans des sources d’énergie propre et portent atteinte aux efforts de lutte contre le changement climatique ».
Au Canada, ces engagements sont restés lettre morte. Un rapport de 2010, publié par le Centre de recherche sur le G20 de l’Université de Toronto, dit n’avoir trouvé aucune mesure mise sur pied au pays pour éliminer progressivement les subventions accordées à l’industrie des combustibles fossiles.
L’estimation de 1,4$ milliards de subventions émane d’un rapport de 2010 publié par l’Institut international du développement durable de Winnipeg. Le chiffre s’élève toutefois à 2,8$ milliards par année en tenant compte des subventions octroyées par les provinces canadiennes. Il existerait 63 programmes de subventions différents au Canada.
Manque de volonté politique
Pour Bill McKibben, influent environnementaliste et journaliste américain, le problème est politique. En point de presse durant PowerShift, il a souligné l'existence de solutions alternatives aux énergies fossiles plus écologiques et qui fonctionnent à grande échelle, mais que peu d’États semblent prêts à adopter.
« Ce n’est pas la technologie qui nous manque, mais bien la volonté politique, a-t-il déploré. L’industrie des combustibles fossiles a une importante main mise sur nos gouvernements. »
Toutefois, cette volonté politique ne trouvera pas forme à l’intérieur des grandes conférences internationales sur l’environnement, selon McKibben. L’action doit être plus concrète. Devant les participants de PowerShift, l’environnementaliste a milité en faveur d’actions concrètes comme la campagne de désinvestissement des fonds dans des sociétés pétrolières et gazières.
Prêcher par l’exemple
Winona LaDuke, spécialiste en économie rurale et militante Anishnaabe, a plaidé en faveur d’une nouvelle stratégie. L’auteure souligne qu’il est possible de freiner un projet de pipeline ou d’extraction minière, mais la stratégie ne diminue pas la demande en énergies fossiles. Pour éviter l’implantation d’autres projets pollueurs, il faut repenser le système et mettre sur pied de nouvelles idées.
« Il nous faut déconstruire nos analyses, a indiqué LaDuke. Dans notre réserve, nous avons découvert que nous dépensons un quart de notre argent sur la nourriture et un autre quart sur l’énergie. Dans le cas de la nourriture, nous dépensons huit millions par année, dont sept millions qui sortent de la réserve pour ramener de la nourriture de l’extérieur. C’est une stratégie inefficace. »
« Nous devons composer avec les problèmes systémiques d’une société prédatrice, a-t-elle ajouté. Ma stratégie est celle donner l’exemple. Faisons-le. Implantons nous-mêmes les alternatives. On nous demandera alors comment nous avons fait ».
Winona LaDuke a partagé avec les participants de PowerShift certaines stratégies implantées dans la White Earth Indian Reservation où elle demeure, une réserve située au nord-ouest du Minnesota. La communauté a entre autres mis sur pied un système d’éolienne et a développé des plantations de maïs issus d’une variété indigène résistante au gel et au vent.
Développement de stratégies
L’événement PowerShift a misé sur le renforcement du mouvement populaire en faveur de la justice environnementale à travers l’apprentissage, la consolidation des connaissances et la collaboration avec les communautés directement touchées.
Des ateliers sur une variété de sujets, allant de la souveraineté alimentaire au journalisme d’enquête, ont été présentés pour développer les compétences concrètes des militants. D’autres présentations se voulaient informatives sur les enjeux environnementaux actuels, comme les sables bitumineux et le projet de pipeline Trailbreaker qui devrait passer par l’île de Montréal. Les participants ont aussi pu profiter d’activité de sensibilisation visant à promouvoir un environnement antioppressif au sein même des mouvements militants.
Cet article a été initialement publié sur le site du Journal des alternatives.