La tension monte. Les réseaux sociaux s’enflamment. Les communautés autochtones se mobilisent. Lundi dernier, une journée nationale d’action a été organisée dans le cadre de la campagne « Idle No More ». La chef d’Attawapiskat Theresa Spence a même entamé une grève de la faim devant le Parlement. Si le mouvement s’est d’abord articulé autour de l’opposition au projet de loi C-45, la conversation qu’il engendre est beaucoup plus large.
Le projet de loi C-45 est le second projet de loi budgétaire omnibus présenté par le gouvernement conservateur. Il introduit des modifications à une vingtaine de lois différentes. Plusieurs changements auront des impacts directs sur les communautés autochtones.
Mouvement horizontal
À la mi-novembre, quatre femmes autochtones et allochtones de la Saskatchewan se sont regroupées pour dénoncer le projet de loi C-45 du gouvernement fédéral. Des séminaires ouverts (« teach-in ») ont été organisés pour sensibiliser la population aux changements apportés par le projet de loi omnibus.
« Le projet de loi C-45 ne porte pas seulement sur le budget, c’est une attaque directe à l’encontre des terres des Premières nations et les étendues d’eau que nous partageons tous à travers ce pays » écrivent-elles sur leur site internet.
Le 4 décembre dernier, dix chefs autochtones se sont vus refusé l’accès au Parlement. Ils avaient été invités par le député du NPD Charlie Angus pour exprimer leurs inquiétudes quant aux changements apportés par C-45. La Chambre des communes était alors en plein marathon de vote sur le projet de loi.
Cet incident a provoqué un tollé sur les médias sociaux. Plusieurs ont suivi les événements en surveillant le mot-clic « #idlenomore ». Rapidement, l’idée du « Idle No More » née en Saskatchewan est devenue un mouvement national.
Harper l’élément déclencheur
Le projet de loi C-45 propose des changements législatifs qui touchent les autochtones, mais aucun processus de consultation a été mis en place. C’est d’ailleurs la deuxième fois que le gouvernement conservateur cherche à modifier un large éventail de lois avec une loi budgétaire omnibus.
C-45 modifie la façon dont un conseil de bande peut céder au gouvernement des terres dans une réserve. Pour le moment, la Loi sur les indiens requiert un vote de la « majorité des électeurs de la bande ». Avec C-45, seulement le vote majoritaire des électeurs présents à une assemblée de la bande serait suffisant. La cession des terres autochtones pourrait donc se faire malgré que les électeurs de la bande ne se sont pas prononcés en sa faveur.
Un autre changement notable vise la Loi sur la protection des eaux navigables pour faire tomber l’interdiction de construire des ponts ou passerelles pour la majorité des cours d’eau du Canada.
Cible coloniale?
Les efforts du mouvement « Idle No More » vise C-45, mais ils ne s’y limitent pas. D’autres projets de loi ayant des conséquences directes sur les communautés autochtones sont visés. La Chambre des communes étudie présentement un projet de loi sur la « transparence des Premières nations en matières financière » et considère une refonte de l’actuelle Loi sur les indiens.
Pour Jessica Gordon, une des instigratrices du mouvement, les groupes autochtones réagissent d’une seule voix à l’attitude intransigeante du gouvernement. « Ces formes de législation coloniale que le gouvernement cherche à nous imposer unilatéralement nous rassemblent, nous rendent solidaires » écrit-elle sur le site du mouvement.
« Le travail que nous avons fait et que nous faisons restera dans son essence un effort “grassroots” et continuera à offrir un forum pour que nos peuples puissent exprimer leurs voix » ajoute-t-elle.
De nombreuses actions sont prévues au cours du mois. Plusieurs groupes convergeront à Ottawa le 21 décembre prochain. Au moment d’écrire ces lignes, aucune action n’était prévue dans la province du Québec.
Crédit photo: Dwayne Bird.